Le suicide des jeunes (4)
Témoignage sur leur itinéraire céleste : la tentative de Julien, les polytraumatisés de la vie…
Le texte 3 sur le suicide des jeunes a rendu compte de l’itinéraire céleste de Jacques. Voici un témoignage sur Julien, autre fugueur de l’âme, doux Peter Pan qui a choisi de quitter volontairement la terre le 25 octobre 1992, juste après l’anniversaire de ses dix-huit ans, comme pour marquer son refus du monde des adultes, monde violent qui blessait ses ailes de fragile goéland.
Quelques mois après son envol, nous avons rencontré sa maman, Nelly et son papa, Daniel. Dans leur regard, on pouvait lire les traces de la terrible commotion qui les avait frappés de manière si brutale. Mais si la profondeur de la blessure apparaissait insondable, pour l’un comme pour l’autre, on sentait qu’ils affrontaient leur souffrance très différemment. Nelly, particulièrement vulnérable, portait en elle une crispation trahissant un mal de vivre qui l'avait poussée plusieurs fois à faire des tentatives de suicide - et ce durant des années, bien avant le départ de Julien. Au contraire, Daniel, dont on percevait la vie intérieure tournée vers l’Espérance, semblait dominer toute révolte : homme de prière et de foi, son chemin de douleur était allégé par une perception intuitive de la Vie de Julien. Ayant vécu son enfance à Lourdes, il s’était imprégné de tout un environnement spirituel qui le renvoyait à la piété toute simple de Bernadette à qui la Sainte Vierge avait promis d’être heureuse, non point dans ce monde, mais dans l’autre. Cette promesse résonnait en Daniel comme une acceptation et une attente. Tel n’était pas de toute évidence le chemin de Nelly.
Ce fut donc pour moi une surprise heureuse quand le 3 janvier 1994, je l’entendis au téléphone m’informer qu’elle avait reçu des messages de Julien. Sa voix n’était pas vraiment incrédule car, influencée par Daniel, elle avait amorcé un itinéraire de foi, mais on percevait cependant une réserve teintée de défiance... Je l’ai rassurée et lui ai dit notre joie pour elle et pour Daniel.
Dès le lendemain, Nelly et Daniel nous adressaient des messages de Julien, messages précisons-le, qui n’avaient à aucun moment été sollicités. Sauf à être de mauvaise foi il n’était pas difficile de faire le discernement tant on ressentait à leur lecture un souffle du Ciel. Aucun être de la terre n’aurait pu les inventer, c’est le critère indubitable que les lecteurs de Vers le Soleil de Dieu connaissent bien. Il était donc clair que le tendre Peter Pan dont la jeunesse et la pureté étaient à jamais préservées volait déjà dans le Ciel Christique, déployant au Vent de Dieu ses ailes de goéland libéré de toute pesanteur terrestre, comme en attestent ces courts extraits :
« Dieu est incompréhensible et Amour. Je suis vivant, je suis Vivant ! Dieu existe, Dieu existe ! Du plus profond de la nuit, un homme n’est jamais seul s’il sait tendre l’oreille vers Dieu. Aimez Christ ! Priez toujours Christ ! N’ayez de cesse sur la Terre de partager aussi un peu de Sa souffrance pour vous délivrer et créer une alliance éternelle avec Lui... Moi je suis à l’école du Christ, élevé avec les autres enfants de lumière : chemins d’amour, de compassion, d’entraide, de justice, d’indulgence. Sachez bien vivre les évangiles et suivre la voie christique, nulle erreur n’est possible alors. J’aime tellement la maison de Dieu ! C’est sur la terre que vous commencez votre spiritualité. Certes, elle n’est jamais parfaite mais ne doit pas être dans les demeures sombres car alors quelles difficultés pour monter et s’élever vers la lumière christique ! » Julien
Les messages, uniquement destinés à ses parents, ont une tonalité différente selon qu’ils s’adressent à l’un ou à l’autre. Ceux pour Daniel, son papa, (appelé tendrement Papayou) sont vibrants d'ardeur juvénile alors qu'à travers ceux réservés à sa maman on ressent une diffuse inquiétude et un désir de la protéger :
« Attention, Maman, attention à la dispersion. Tu voudrais que la Terre soit déjà le Ciel mais le Ciel est encore trop haut et toi trop petite ! Ma Maman chérie, ta place est encore sur la Terre, tu ne t’en élèveras que plus légère. Va demain à l’église et prie pour la réconciliation de ton coeur. Nous, là-haut, nous sommes tous avec toi... Maman, si tu dois partir en guerre, arme-toi comme Christ. Seul Dieu sauve et rachète les âmes perdues. Pense à Christ, prends Son Chemin, il est si aisé alors de vivre. » Julien
Très tôt Julien manifeste qu’il a rejoint Arnaud :
« Merci à Mamoune, merci à toutes les mères. Dans le Mouvement Stella, soyez des piliers... Sachez apaiser, consoler, guider... Il faut laisser à Arnaud les messages christiques. Je ne suis qu’un compagnon d’armes pour la victoire de l’Amour. » Julien
Les pontonniers du Ciel, tableau de Janine DURRENS. Couverture du tome II de Vers le Soleil de Dieu
L’histoire pourrait s’arrêter là et être une expression émouvante de la communion des saints. Mais elle a une suite dont le tragique terrestre est heureusement compensé par ce que nous connaissons de son prolongement au Ciel. En effet, alors qu’elle avait reçu le 8 septembre 1994 un message d’encouragement de Julien : « Ma petite Maman, sois moins malheureuse, je vais te parler souvent et je t’aide autant qu’il m’est possible », un mois plus tard Nelly mettait fin à ses jours.
La voix de Julien s’est tue, sa tendre mission était achevée puisque sa maman avait momentanément perdu sa guerre des étoiles personnelle contre les forces des ténèbres.
Mais c’était sans compter sur la miséricorde divine. En effet le 28 novembre 1994 Arnaud prenait le relais de Julien dans un message qui non seulement adoucit le caractère dramatique du destin de Nelly mais témoigne d’un Dieu qui aime, sauve et pardonne toujours :
« Comme il y a des polytraumatisés de la route, il y a des polytraumatisés de la vie. Nelly était de ceux-là : Julien a tout tenté, puisqu'il y avait été autorisé, afin de l'empêcher d'esquiver l'épreuve terrestre. Certes Dieu veut que l'on prenne l'élan dans notre vie de chair et si nous sommes tombés en chemin, c'est en chemin que nous devons nous relever ; sinon à quoi sert l'Incarnation qui "rachète" cette vie avec notre collaboration....
Mais rien n'est perdu pour ces malades, ces paralytiques de l'âme car, avec Dieu, rien n'est jamais désespéré, tout peut se rattraper en un jour et, s'il le faut, en un siècle ou en un millénaire - ce qui n'est rien ici... Mais s'il faut tout de même la durée pour les accidentés, Dieu accorde le temps comme la musique à la voix. »
Arnaud Vers le Soleil de Dieu Tome III
Et nous apprenons que Nelly, aidée par « les combattants aux mains chargées d’étoiles » et les prières de la terre, est déjà en train de guérir son âme blessée : « Pour Nelly que je visite régulièrement en compagnie de Julien, la convalescence nécessitera bien de ce temps de miséricorde divine auquel s'ajouteront vos prières, et surtout celles de Daniel qui lui sont si nourrissantes que, comme la pluie sur une fleur assoiffée, j'en perçois moi-même les effets sur Nelly : elle se redresse et ses couleurs s'avivent. L'exemplarité de la tentative de Julien doit être connue de tous et le combat céleste de Nelly aussi. »
Arnaud a demandé que soient insérés des messages de Julien dans le troisième tome, ce qui a été fait bien sûr, avec l’autorisation de Daniel. A notre époque où tant de personnes sont des polytraumatisés de la vie, il est essentiel de connaître jusqu’où peut aller la miséricorde de Dieu dont Arnaud dira ultérieurement :
« La grâce est un Rayon d’Amour que Dieu dispense sans cesse et qui peut traverser toutes les ténèbres. Si Son laser d’Amour croise une larme de regret, alors jaillira Son Pardon. »*
Et je terminerai par cette phrase de Julien qui doit être joie pour vous tous, parents de jeunes fugueurs de l’âme,** car elle résume ce qu’est désormais leur itinéraire céleste : servir le Christ, servir Celui qui est l’Amour et nous entraîner vers LUI.
« Ensemble, avec les enfants de lumière, nous élèverons Christ si haut, si haut que le monde en sera étonné. »
A nous de les écouter et d’œuvrer sur terre pour transformer notre monde de plus en plus sombre car livré à l’incroyance ainsi qu’au matérialisme détruisant les Valeurs Essentielles qui nous relient au Créateur, c'est-à-dire à l’AMOUR SAUVEUR. Sachons voir le danger et être des veilleurs de l’âme des jeunes qui s’étiole et cherche désespérément la Lumière.
« …Faites du temps terrestre un temps compté
Et des plaisirs un appétit dompté.
Vous voudriez posséder et la Terre et les Cieux,
Mais les rivages radieux n'appartiennent qu'à Dieu. »
Arnaud. Vers le Soleil de Dieu
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*Voilà qui rejoint ce que nous dit le Catéchisme de l’Eglise catholique au sujet des suicidés : « On ne doit pas désespérer du salut éternel des personnes qui se sont donné la mort. Dieu peut leur ménager par les voies que Lui seul connaît l’occasion d’une salutaire repentance. L’Eglise prie pour les personnes qui ont attenté à leur vie. » (n°2283)
** Comment ne pas avoir une pensée pour tous les jeunes fugueurs de l’âme Stella dont je connais les visages et que je ne puis tous nommer, craignant de commettre des oublis tant ils sont nombreux ? Que leurs parents sachent qu’ils ne sont pas oubliés. Si j’ai cité les témoignages d’Isabelle, Nicolas, Isabelle, Jacques et Julien, c’est parce qu’ils étaient représentatifs de leurs compagnons enfants de lumière mais ils sont tous nos pontonniers du Ciel.
N’oublions pas non plus les adultes comme Nelly, polytraumatisés de la vie, de plus en plus nombreux mais souvent passés sous silence. Un exemple : dans l’actualité du 51e Salon de l’Agriculture qui s’est ouvert le samedi 22 février, on semble ignorer qu’un agriculteur se suicide tous les deux jours …